Née en 1956 à Port-au-Prince, Haïti, Elsie Suréna s'est établie depuis 2010 à Montréal (Québec, Canada), où elle y continue les activités artistiques et littéraires auxquelles elle s'adonne depuis dix ans. Elle a participé à différentes expositions d'arts visuels avec ses photos en noir et blanc et a récemment publié Lanmou se flè sezon, son cinquième recueil de poèmes. Plusieurs de ses textes ont paru dans des revues, journaux et anthologies, certains traduits en anglais, espagnol, portugais et japonais.
Elle a remporté le prix Belleville Galaxie au 5e Concours International Marko Polo de Haïkus en 2009, ainsi qu’une mention honorable au palmarès du Concours international de haïkus du Maïnichi, à Osaka (Japon).
L’amour, le quotidien, l’absence sont des thèmes qu’elle aborde souvent sur un ton enjoué, sensuel, intimiste. La contacter directement.
Mireia Porta i Arnau est née presque dans la librairie-papèterie-galerie d’art familiale, à Barcelone, l’incontournable JAIMES, fondée par son grand-père en 1941 et spécialisée en livres francophones. Elle y est née presque, puisque la clinique était à 500 mètres... Or, et c’est un or en or, comme elle y passait pas mal de temps à jeter un coup de main (à la librairie, pas à la clinique, bien sûr), ça lui a permis depuis sa tendre enfance de s’imprégner d’art et de littérature. Et de les aimer.
D’ailleurs, vers ses huit neuf ans, son grand-père lui a vendu à crédit – bordereau émis dans toutes les règles du commerce, montant 4250 pésétas – une belle boîte de peinture à l’huile, pinceaux, plusieurs toiles, à payer en échange d'œuvres. Il fallait donc pondre des tableaux pendant le week-end, les lui montrer le mercredi après-midi suivant (bouffe des petits-fils chez les grands-parents) bordereau en main, et là, devant l’angoissée et malheureuse artiste en herbe, il regardait d’un œil critique très sérieux, faisait des commentaires très bien placés et débitait son prix : 200 pésétas. Aïaïaïe ! à ce rythme-là, elle en avait pour un bon temps pour régler sa dette ! En fait, elle n’a pas fini jusqu’à présent de la lui payer, cette dette, pas d’argent, de reconnaissance. Il est toujours là, même s’il est parti en 2009 à 100 ans et 4 mois. Hé oui !
Elle a fait ses études au Lycée français de Barcelone, puis s’est graduée à l’École de Traduction et d’Interprétation de l’Université autonome de Barcelone et a eu une maîtrise de Littérature et langue anglaise à la Faculté de lettres de cette même université, le tout en travaillant à la librairie et en faisant des traductions. Comme par après, elle alternait ses jours en tant que traductrice littéraire et libraire. Plus de 160 livres traduits.
Depuis 2005, elle habite en Haïti, pays qui surprend à chaque quart de tour, pays qui prend aux entrailles, pays qui lui a fait ressortir ses vieux pinceaux enfouis dans la mémoire (et elle lui en sera aussi éternellement reconnaissante et travaillera pour la cause). Mue par d’un côté sa passion pour le dessin, et de l’autre pour le digital, il y a cette envie de rendre la beauté et la réalité de l’Haïti chérie que plein de gens bafouent. Haïti n’est pas seulement ce que l’on montre dans les médias quand il y a du micmac...
Tranquillité et beauté envahissent l’esprit sur tout le parcours de ce petit bijou de livre. Elsie Suréna a un don particulier pour faire parler les objets du quotidien. à travers la soupière qui ne veut pas travailler les dimanches, les plantes délaissées qui, en réunion sindicale, cherchent des strategies pour se faire arroser, les verres qui se chamaillent pour avoir chacun raison, entre autres, la sérénité avec laquelle elle fait ressortir les leçons des situations de la vie est désarmante. Même la force de l’entêtement des passions conquiert le lecteur avec une douceur apaisante.
Figurée au programme de plusieurs écoles dont le Collège St Martial, cette deuxième édition illustrée par Mireia Porta Arnau constitue un témoignage de tendresse qui touche autant les jeunes que les adultes.
L’arbre qui rêvait d’amour n’est pas seulement à lire,
c’est un livre à pratiquer.
Un dimanche matin, la soupière de faïence à petites fleurs bleues, auréolée d’un fumet de céleri, d’oseille et de persil, quitta d’un pas décidé la table et sa blanche nappe damassée pour aller se poster au pied du lit de sa maîtresse, menton levé et poings aux hanches :
— N’ai-je pas droit moi aussi au repos du dimanche ? Ne puis-je, comme tout le monde, avoir envie de faire la grasse matinée ?
— Non, mais…; ton couvercle doit être posé de travers ! C’est ridicule ! D’ailleurs, la soupe au giraumon du dimanche matin c’est sacré, même si on ne l’aime pas. Sinon, les gens du voisinage diraient que je ne suis pas… catholique. Allons, allons, sois raisonnable !
D’une démarche pesante, soupe affadie et légumes tout à coup refroidis et mous, la soupière de faïence à petites fleurs bleues retourna se hisser à grand-peine sur la table, laissant derrière elle trois longues traînées huileuses, jaunes de contrariété.